#20 - Mais où est donc Kapa ?

Publié le par Dawawa

" Voilà ma petite patiente qui se réveille " dit une voix masculine, alors que je sortais lentement de la brume dans laquelle j’étais plongée depuis quelques heures

Debout près du lit, un homme avec un gentil sourire et des yeux doux, me regardait attentivement. J’étais dans le brouillard, je ne savais pas où je me trouvais, et j’avais terriblement mal à la tête.

" Où suis-je ? " Questionnais-je. " Vous êtes à l’Hôpital Général de Montsimpa, et je suis le Docteur Meilleur. " Me répondit-il. " Qu’est ce que je fais ici  ? " Demandais-je.

 

Docteur Meilleur :   Un policier en patrouille vous a aperçu alors que vous étiez étendue sur le trottoir d’une ruelle. Il a d’abord cru que vous cuviez votre vin, puis comme il ne parvenait pas à vous réveiller, il a appelé une ambulance, qui vous a conduit ici. Je vous ai examiné sommairement, et hormis une petite bosse sur la tête, je n’ai rien vu d’anormal. Vous voulez bien me raconter ce que vous faisiez là ?

 

Je ne pouvais rien lui dire. Je ne savais pas. Ma tête était vide. J’avais beau cherché au plus profond de moi, il ne me venait rien. Je n’avais plus aucun souvenir. Je ne savais pas qui j’étais, d’où je venais, ni ce que j’avais fait. C’était très angoissant. Le Docteur Meilleur me raconta, que dans la poche droite de mon veston, on avait trouvé une enveloppe contenant mille dollars en petites coupures. Dans la poche gauche, il y avait un bout de papier avec une adresse. Malheureusement je n’avais aucun papier d’identité sur moi.

Le Docteur Meilleur, se fit rassurant, et pour me calmer me donna un tranquillisant. Il m’expliqua que je souffrais peut-être d’amnésie temporaire, que nous ferions des examens etc…

 

Dès le lendemain, plusieurs spécialistes se penchèrent sur mon cas Ils étaient tous d’accord sur un point, je souffrais d’amnésie rétrograde. S’ils s’accordaient sur ce point là, leur opinion divergeait au sujet de la forme d’amnésie dont je souffrais, et sur ce qui avait pu provoquer celle-ci. L’un prétendait que je souffrais de la forme dite psychogène, pendant qu’un autre prétendait que c’était plutôt neurologique.

 

L’un disait que mon amnésie était le résultat d’un traumatisme crânien (un coup sur la tête). Un autre disait que c’était plutôt un état désagréable comme un stress prolongé, qui avait provoqué mon amnésie. Un troisième disait que cela ressemblait davantage à un problème d’alcoolisme chronique. Tandis, que le dernier prétendait lui, que c’était plutôt des événements douloureux comme le viol, l'inceste, etc... qui étaient à l'origine de ma perte de mémoire.

 

Moi, ce n’était pas tellement la cause ou la forme qui me préoccupait, mais plutôt si ma mémoire allait revenir. Là-dessus non plus on ne pouvait pas se prononcer clairement. On disait qu’une récupération était possible, mais que les faits les plus rapprochés de l'accident seraient moins bien retrouvés et pouvaient être perdus à jamais.

 

Le Docteur Meilleur était de loin le plus gentil de tous, et il était mon docteur attitré. Il proposa de m’expliquer tout cela devant un bon café de la cafétéria. Et comme, il ne voulait pas que je me fatigue, il insista pour prendre un fauteuil roulant. Le bon docteur avec son gentil sourire, s’offrit pour être le conducteur de ma limousine

Il consacra pas mal de temps à m’expliquer ce que l’amnésie était exactement. On parle d'amnésie rétrograde disait-il, lorsque la personne ne se souvient plus des événements de sa vie survenus avant l’accident. Il m’expliqua que l'amnésie était une perte importante de la mémoire, une perte plus grande que le simple oubli qui survient normalement dans la vie de tous les jours. Avec le temps, disait-il, on assiste souvent à une récupération progressive des souvenirs.

 

Il était passionné par son métier, et il s’enflammait à la moindre question. Une question simple comme : "C’est quoi l’hippocampe ? " Donnait droit à de très longues et compliquées explications du genre : " Et bien l'hippocampe reçoit des connexions des aires corticales sensorielles primaires, associatives unimodales (ne concernant qu'une modalité sensorielle) et multimodales, et des cortex rhinal et entorhinal. Alors que ces connexions dites antérogrades convergent vers l'hippocampe, d'autres voies rétrogrades le quittent et retournent vers les cortex primaires pour y fixer dans les synapses corticales … "

La plupart du temps, il en disait tellement long, qu’il me perdait.

 

Le premier de l’an, le Docteur Meilleur me fit venir à son bureau. Il m’expliqua que les examens ne révélaient rien d’anormal chez moi. J’allais bien, j’étais en bonne santé etc… Il ne voyait aucune raison de me garder hospitalisé plus longtemps. Il croyait que ma mémoire reviendrait petit à petit. Bien sûr il me verrait périodiquement pour s’assurer que tout allait bien.

 

J’étais complètement paniquée. Qu’est ce que j’allais faire, où irais-je ? J’avais mille dollars en poche. Je ne pourrais pas tenir longtemps avec ça. Je n’avais nul part, ni personne chez qui aller. Le Docteur Meilleur, me dit alors, qu’il connaissait quelqu’un qui pourrait me louer à bas prix, une petite chambre, le temps de m’organiser. La personne en question, était une collègue, une spécialiste et une bonne amie à lui. Il l’appela à son bureau, et lui demanda de venir me rencontrer.

 

Je me souvenais bien d’elle, elle aussi m’avait examiné. Elle me dit que ça lui faisait très plaisir de me dépanner, que chez elle je serais bien, qu’elle avait une grande chambre qui ne servait à rien, et que j’étais la bienvenue. J’ai accepté sa proposition trop contente d’avoir un endroit où aller. J’allais sortir le jour même, à la fin du quart de travail de Rhonda.

 

Je n’étais pas fâchée de quitter l’hôpital finalement. Quand Rhonda est venue me chercher j’étais prête, et j’ai remercié le Docteur Meilleur, pour ses bons soins. " Vous ne pensez quand même pas vous débarrasser de moi, j’espère ! Je vous verrai demain. J’irai prendre un café chez Rhonda avec vous. Rhonda fait le meilleur café en ville ! " Dit-il en souriant. J’étais contente, puisque je le trouvais charmant.

 

Rhonda habitait un grand logement, avec de beaux planchers de bois francs. Elle me fit visiter les lieux, et le tout me plaisait bien. La chambre qu’elle me louait était belle et grande, et très confortable. J’étais ravie. Rhonda me prêta même de supposés vieux vêtements … Ces vieux vêtements m’allaient bien, et ils n’étaient pas si vieux qu’elle le prétendait. Certains portaient encore l’étiquette du magasin. C’est vous prouver à quel point elle était charitable.

 

Rhonda était également généreuse de son temps, et pendant des heures elle m’écoutait parler de mes craintes et de mon passé que je ne connaissais pas. Je n’étais apparemment pas mariée car je ne portais aucune alliance. Si j’avais une famille, visiblement elle ne tenait pas à moi, puisque personne ne portant mon signalement n’était recherché. Je n’avais peut-être même pas de famille. C’est pourquoi, en discutant avec elle, il devint soudain clair dans mon esprit, que je devais me rendre à l’adresse que j’avais retrouvée dans la poche de mon veston. Rhonda était d’accord avec moi, je devais tenter le coup. Je n’habitais probablement pas à cet endroit, pourquoi inscrire notre adresse sur un bout de papier ? Mais comme moi, Rhonda croyait qu’il y avait une petite chance pour que la ou les personnes à cette adresse sachent qui j’étais.

 

Je m’y suis donc rendu dès le lendemain. Le quartier était peu sûr, mais en plein jour, je n’avais pas trop peur. Je cherchais le 3, rue de l’Espérance.

 

J’ai fini par trouver, et un type aux cheveux longs est venu ouvrir. Quand je l’ai vu, lui et le type avec lui, j’ai presque espéré qu’ils me diraient qu’ils ne savaient pas qui j’étais. Ce qu’ils avaient l’air vilains ces types ! Et puis l’appartement était vraiment malpropre. " Qu’est ce que je suis venu faire ici ? " Me demandais-je

 

Le type aux cheveux longs :   Mais c’est la m’dame de l’autre nuit ! Regardes Jos, je t’avais bien dit qu’elle allait revenir pour une partie de jambes en l’air ! Je te l’avais bien dit qu’elle était une petite cochonne la m’dame ! 

Moi : Vous me connaissez  alors ?

Le type aux cheveux longs : Ben si ! Vous êtes venue ici l’autre nuit. Moi, je l’avais tout de suite remarqué que vous étiez une pute. D’ailleurs après votre départ, j’ai dit à Jos : " Elle se serait une pute, que ça m’étonnerais pas ! " Hein Jos que je te l’ai dit ?

" La ferme Pipi0lit " Dit l’autre type qui s’appelait Jos.

  

Ce type, Jos semblait très fâché ! Il s’est approché de moi avec l’air menaçant et en me pointant du doigt il cria après moi.

Jos : Si vous pensez obtenir un remboursement pour la camelote que vous avez acheté, oubliez ça ! C’est non remboursable ! Vous l’avez pris ce stock, alors vos mille dollars, faut faire une croix dessus !

Moi : Non, Monsieur je ne suis pas venue pour ça. Je voulais juste savoir si vous saviez qui j’étais !

 

Pipi0lit : T’as vu comme elle est perdue Jos ? Je te l’avais bien dit, qu’elle se droguait pas à peu près la m’dame. Tu voulais pas me croire !

Jos : Ouais t’as sans doute raison ! Elle doit avoir beaucoup de neurones de brûlées, c’est clair.

Pipi0lit : Ben moi, je l’avais vu tout de suite, ses yeux étaient tout rouges !

Jos : Ouais, ben t’es pas mal fort ! Pas de chance ma tite dame, si vous êtes venue pour de la poudre, nous n’en avons plus !

J’étais complètement découragée ! Bon sang, mais quelle sorte de personne étais-je donc ?

 

Pipi0lit : Faut pas faire cette tête m’dame. Je peux vous offrir une tite frette ?

Moi : Une quoi ?

Pipi0lit : Une petite bière froide ?

Moi : Euh, non-merci !

 

Pipi0lit : Bon, vous faites des manières maintenant. L’autre soir pourtant, vous aviez pas craché dedans la bière, vous l’avez avalé d’un trait ! J’ai même dit à Jos : " La pute qui se drogue, je pense que c’est une alcoolique. Hein Jos que je l’ai dit ?

Moi : Vous aviez vraiment pensé que j’étais alcoolique ?

Pipi0lit : J’en suis même sûr ! Mon père et ma mère étaient alcooliques, alors je sais à quoi ça ressemble !

 

Pipi0lit : Mais je serais vous, j’arrêterais la boisson. Ça vous va pas bien. Vous êtes devenue agressive, vous m’avez même menacé ! Hein Jos qu’elle m’a fait des menaces ?

Moi : Oh ! À ce point là ?

Pipi0lit : Ouais, à ce point là, même que j’ai pensé, cette folle va me mordre !

Moi :  Je suis vraiment désolée …

Pipi0lit : Bah, faut dire que c’est tout un mélange la drogue et l’alcool ! Moi, j’ai comme principe de ne jamais mélanger les deux. Ça fait jamais bon ménage ! Hein Jos, que j’ai ça comme principe ?

Pipi0lit : Bon, c’est bien intéressant le bavardage, mais si on la faisait cette partie de jambes en l’air m’dame ?

 

J’ai quitté sans demander mon reste. Une fois dehors, j’ai cessé de retenir ces larmes qui me picotaient les yeux depuis un bon moment. Sans que je n’y puisse quoi que ce soit, j’ai pleuré comme un bébé.

 

Pas étonnant que personne ne me recherche … Qui voudrait d’une droguée, prostituée, alcoolique et violente  ? Hein qui ?

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K
Vivement que ton PC remarche je suis en manque. A très bientôt
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C
Eh bien ouf ! je ressort toute remuée de cette fantastique histoire ! <br /> Quel talent !dans la mise en scène , dans les décors , j'ai admiré l'habit taché de sang du comte , j'adore les lits spéciaux , l'hopital et la rue mal famée .sont plus que superbes , j'apprécie les recherches que tu dois faire avant de faire ton histoire!!!! ...<br /> les caractères des personnages sont formidables aussi ,mais surtout encore une fois ce qui rend ton histoire si vivante est ce soucis du détail ....la lettre dans la main, sur l'oreiller , celle que tu as du faire pour nous ...<br /> Ton histoire est un vrai délice Dawawa!!!!j'en redemande  !!!!
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S
Je dirais comme Anne : c'est magnifique !Revoir Kapa, la voir dans un environnement si convaincant (pas seulement l'hopital mais aussi la ruelle et la pièce sordide), la voir allongée pour papoter avec Rhonda, la retrouver désespérée après avoir appris ses sombres penchants (c'est excellent, sa conclusion), c'est un plaisir de tout regarder et de tout savourer.Je me trompe, ou le docteur Meilleur est charmant ? ;-)Bravo, Dawawa, tu nous tiens captifs !
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S
Ha povre Kapa !!!!!!!!!!!!!!!!!!
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F
Oui, moi aussi j'ai été impressionné par l'hôpital et les petits détails qui le rendent si réel.Voir une Kapa désemparée se retrouver à nouveau dans le taudis de ces 2 types, c'est assez poignant. Heureusement que Kapa rencontre aussi des gens comme le Docteur Meilleur ! (enfin, avec la chance qu'a Kapa, ce gentil docteur cacherait lui aussi de vilains penchants que cela ne m'étonnerait pas plus que ça !)Eh bien ! en lisant Kapa, on finit par voir le mal partout  !
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